Table des matières
- Introduction
- Les Calètes
- De l’oppidum gaulois à la romanisation
- Le Camp du Canada
- Spécificités funéraires et culturelles
- Conclusion
- Bibliographie
Introduction
L’histoire de Fécamp avant le Moyen Âge est une période charnière, témoignant d’une occupation humaine continue et de transformations culturelles et économiques majeures. L’étude de cette période, à travers l’archéologie et les sources historiques, révèle une région dynamique, intégrée aux réseaux d’échanges et marquée par des spécificités locales. Fécamp était desservie par plusieurs voies romaines secondaires. Une voie côtière existait depuis Harfleur jusqu’à la Durdent en passant par Étretat. Le chemin Fécamp-Étretat par les Loges est également antique.

Les Calètes
La région de Fécamp, située dans le Pays de Caux, a été habitée dès l’époque gauloise par le peuple des Calètes. Les Calètes étaient un peuple celte de la Gaule Belgique, établi dans l’actuel Pays de Caux, en Seine-Maritime. Leur nom dérive du terme gaulois « caleto-« , signifiant « dur » ou « vaillant », reflétant probablement leur bravoure au combat. Leur chef-lieu était peut-être Calidu, oppidum de localisation incertaine. À l’époque romaine une citée est fondée sous le nom de Juliobona (aujourd’hui Lillebonne).
Le nom « Pays de Caux » dérive directement de celui des Calètes, attestant de leur influence historique dans la région. De plus, des noms de lieux tels que Caudebec, Calleville ou Calletot rappellent leur présence historique dans la région.
Leur capitale, Lillebonne, devint un centre urbain important, doté d’un théâtre gallo-romain et d’autres édifices publics. Les vestiges archéologiques, tels que des mosaïques et des statues, témoignent de la prospérité et de la romanisation de la cité.
Après la conquête romaine, en 27 av. J.-C., leur territoire fut intégré à la province de Gaule lyonnaise. Les Calètes adoptèrent progressivement le mode de vie romain, développant des infrastructures urbaines et rurales, notamment des villas et des routes facilitant le commerce. Leur territoire comprenait plusieurs oppida (places fortifiées), dont celui de Sandouville, l’un des plus vastes de la Gaule avec ses 144 hectares, ainsi que les Fossés de Bénouville à Étretat et le Camp de Canada à Fécamp.
De l’oppidum gaulois à la romanisation
Les oppida, ou lieux fortifiés, sont les témoins les plus visibles de cette période. Ces fortifications, souvent confondues avec des « camps de César » au XIXe siècle, sont aujourd’hui reconnues comme des constructions gauloises, révélant l’organisation territoriale des peuples de cette époque.
Ces oppida, tels que celui de Liercourt-Erondelle, témoignent d’une occupation humaine et d’une organisation sociale structurée avant la conquête romaine. L’étude de ces sites permet de reconstituer une partie de la vie quotidienne et des stratégies de défense des populations gauloises.
Avec l’arrivée des Romains, la région de Fécamp s’intègre à la Gaule romaine, une période de transformations profondes. Lillebonne, située à proximité, est identifiée comme Juliobona, le chef-lieu de la cité des Calètes. Bien que Fécamp ne soit pas reconnue comme un centre urbain majeur à cette époque, des découvertes archéologiques attestent d’une présence romaine et d’une activité économique.
L’analyse des amphores découvertes dans la région révèle d’importants échanges commerciaux avec d’autres parties de l’Empire. Ces amphores, souvent retrouvées fragmentées, indiquent l’importation de produits tels que le vin, l’huile d’olive, le garum (sauce de poisson). Les amphores de type Dressel 1, Dressel 2/4, et Gauloise 4 sont particulièrement présentes, suggérant des échanges avec l’Italie, l’Espagne et le Sud de la Gaule. Ces découvertes témoignent de l’intégration de la région de Fécamp dans les réseaux commerciaux de l’Empire romain.
De plus, la présence d’amphorisques, petits récipients utilisés pour transvaser des liquides, soulignent l’existence de commerces locaux. L’étude des tituli picti (marques peintes) et des timbres sur les amphores fournit des informations précieuses sur les producteurs et les circuits commerciaux, révélant l’étendue des liens économiques de la région.
Le Camp du Canada
Robert Soulignac indique qu’il existait un oppida de « type Fécamp », au croisement entre les rivières Valmont et Ganzeville, appelé cité d’Orenge.

Le Camp du Canada, d’une superficie d’au moins 20 hectares et culminant à 90m de hauteur, situé chemin du Nid de Verdier à Fécamp, est un site archéologique important qui témoigne de l’occupation gauloise et romaine de la région. Il est classé monument historique depuis 1983. Il est situé à environ 3,2 km de la mer, entre les rivières de Valmont et de Ganzeville. Cette position stratégique, à la fois sur le littoral et à proximité de cours d’eau, a pu jouer un rôle dans le choix de cet emplacement pour un site fortifié.
Le site est appelé « Camp du Canada » depuis le XVIIe siècle. Des fouilles y ont été menées en 1890 et 1939. Ces recherches ont permis de découvrir des vestiges archéologiques de différentes périodes. Les fouilles ont mis au jour :
- Des tranchets néolithiques, indiquant une occupation antérieure du site
- Des monnaies gauloises, témoignant de l’occupation du site à l’époque gauloise
- Une possible installation annexe d’un temple de type celtique, ce qui suggère une fonction religieuse du site
- De la poterie sigillée et belge de l’époque du règne d’Auguste, indiquant une occupation romaine.
L’occupation gauloise du site semble avoir été de courte durée. Le Camp du Canada fait partie des enceintes à remparts multiples. Bien qu’il soit mentionné dans le contexte des enceintes de type « Fécamp », il ne correspond pas à la définition stricte de ce type, qui se caractérise par un fossé plat. Il est effectivement possible que la population ce soit déplacée vers la vallée de Fécamp après la conquête de César, et le camp pouvait servir de repli défensif en cas de besoin.
En résumé, ce site témoigne d’une occupation humaine dès le Néolithique, puis à l’époque gauloise et romaine. La découverte de vestiges variés, tels que des outils néolithiques, des monnaies gauloises et de la poterie romaine, souligne l’importance de ce site comme lieu de passage et d’activité à différentes périodes.
Spécificités funéraires et culturelles
L’archéologie funéraire apporte un éclairage particulier sur les pratiques culturelles de la région à cette époque. Les pratiques funéraires locales semblent se distinguer des pratiques générales de la Gaule romaine. Une particularité notoire est l’absence d’épingles à cheveux dans les tombes à inhumation, alors que ces objets sont fréquents dans d’autres régions. Cette absence pourrait témoigner de rites funéraires ou de traditions vestimentaires spécifiques à cette région. On note également une relative rareté des objets de type Fécamp dans les tombes à incinération. Cette spécificité laisse entrevoir une diversité culturelle et une adaptation des pratiques funéraires aux particularités locales. L’étude approfondie des contextes funéraires et des objets associés pourrait permettre de mieux comprendre les croyances et les pratiques des populations locales.
Conclusion
La région, d’abord structurée par les oppida gaulois, s’intègre progressivement à la Gaule romaine, devenant un carrefour d’échanges commerciaux et culturels. Malgré des lacunes dans la documentation, les recherches archéologiques et les analyses des sources historiques permettent de mieux comprendre cette période cruciale. Les études sur les oppida, les amphores et les pratiques funéraires témoignent de la richesse et de la complexité du passé de Fécamp.
Bibliographie
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- DUVAL Paul-Marie, « Enceintes gauloises de l’Ouest et du Nord », Travaux sur la Gaule (1946-1986), École Française de Rome, 1989. pp. 81-110.
- DUVAL Paul-Marie, « Une enquête sur les enceintes gauloises de l’Ouest et du Nord », Gallia, tome 17, fascicule 1, 1959, pp. 37-62.
- JIGAN Claude, LE MAHO Jacques, « Le Pays de Caux gallo-romain : Robert Soulignac, Les Calètes dans la région de Fécamp », Annales de Normandie, 33ᵉ année, n°1, 1983. pp. 75-76.
- LAUBENHEIMER Fanette, MARLIERE Élise, Échanges et vie économique dans le Nord-Ouest des Gaules (2 volumes) (Nord/Pas-de-Calais, Picardie, Haute-Normandie). Le témoignage des amphores du IIe s. av. J.-C. au IVe s. ap. J.-C, Presses universitaires de Franche-Comté, 2010.
- LEMAN DELRIVE Germaine, « Oppida ou forteresses gauloises entre la Somme et la frontière belge : propositions de classement et de chronologie », Revue du Nord, tome 62, n°247, Octobre-décembre 1980, pp. 791-804.
- SOULIGNAC Robert, Les calètes dans la région de Fécamp éd. EMTN Fécamp 1980
- STREIFF René, « La Normandie avant les normands – Époque Gallo-Romaine », Études Normandes, livraison 4, n°10, 3e trimestre 1952, pp. 133-144.
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